Memeu

Je vais vous raconter l’histoire d’une femme qui n’avait pas de mari. Cette femme avait un jeune fils qu’elle gardait avec elle, et ce, jusqu’au jour où, à son tour, le fils serait capable de la faire vivre.

Elle vivait avec un homme qui l’aimait, mais cet homme n’aimait pas son fils. Aimant beaucoup son enfant, elle se mit à ruminer : « Que va-t-il faire à mon fils? »

Enfin, un jour, l’homme monte dans son canot, pendant que la femme s’en alla dans le bois pour faire la chasse et tendre des collets pour subvenir à ses besoins.

Alors, l’homme dit au petit garçon : « Embarque avec moi, je vais te faire faire une promenade sur l’eau. »

Malgré sa peur, puisqu’il sentit bien que l’homme ne l’aimait pas, le jeune garçon embarqua dans le canot. L’eau était très calme et laissait apparaître une île au loin. « C’est là-bas au large que nous irons » dit l’homme. Arrivés à l’île, il fait descendre l’enfant. Une fois le garçon débarqué, l’homme l’abandonne et retourne chez lui.

Après un certain temps, le garçon commença à avoir faim. Mail il n’y a rien à manger sur l’île. Il n’y a rien qui pousse pour produire des petits fruits. Donc, rien à se mettre sous la dent.

Alors, il pense et dit en lui-même : « Je marcherai le long de la grève voir si les vagues ont apporté quelque chose. »

Enfin, en marchant le long de la grève, il voit un grand serpent qui émerge de l’eau, celui qu’on appelle le serpent à cornes. « Si je lui demandais, il pourrait probablement me faire traverser le lac » dit-il.

Il lui parla ainsi : « Grand-mère, dit-il en s’adressant au serpent à cornes, pourrais-tu me transporter l’autre côté du lac où se trouve ma mère? Tu me fais pitié mon enfant, dit ce dernier, mais je suis incapable de te faire traverser le lac. Regarde, dit-il, si tu places des petites roches sur mon dos, cela me cassera l’épine dorsale. Je suis trop vieux pour te porter. Continue un peu plus loin sur la grève, c’est ton grand-père qui est là à moitié sorti de l’eau. C’est lui qui pourrait te faire traverser. Il est beaucoup plus courageux que moi. Oui » répond le garçon.

Tout en marchant le long de la grève, il voit un serpent à cornes sortir de l’eau comme lui avait prédit sa grand-mère lorsqu’elle avait dit : « Va voir ton grand-père. »

Alors le garçon dit : « Grand-père, pourrais-tu me transporter de cette île où je suis jusqu’à l’autre rive du lac pour que je voie ma mère? Mais oui, répond le serpent, je peux te faire traverser. Cependant, tu vas surveiller le ciel et voir s’il fait beau. Si le ciel est tout à fait clair, je pourrai te faire traverser, mais je ne puis me montrer en plein jour, car si le tonnerre gronde, les éclairs tomberont sur moi. »

Le garçon répondit : « Le ciel est bleu partout, grand-père. Tu auras tout le temps pour me faire traverser. C’est bien, va casser des aulnes pour me fouetter, dit le serpent. Embarque beaucoup d’aulnes et tiens-en plusieurs dans tes mains. Frappe-moi sur les cornes avec un aulne et lorsqu’il sera complètement brisé, tu en prendras un autre. »

Après avoir cassé des fouets, le garçon monte sur le serpent, se place derrière les cornes et commence à frapper dessus avec les aulnes.

L’endroit où le garçon doit débarquer est tout proche. Ils sont presque rendus au but, mais il ne reste que les deux derniers fouets.

Le serpent continue à avancer vite, lorsque le tonnerre se fait entendre, bien que le ciel soit encore tout à fait clair. « Mon petit-fils, dit le serpent, dans quelques instants, tu débarqueras sur un bon fond. »

Pendant que le serpent avance toujours, la foudre tomba toute proche, derrière eux. Voyant que l’eau n’est pas trop profonde, le garçon saute à l’eau. Au même moment, le tonnerre frappe. « Oh, j’ai failli mourir » dit le garçon.

Alors, il marche dans l’eau et enfin touche la grève. Il regarde, mais ne voit rien, absolument rien. « Je n’ai aucune idée où peut se retrouver mon grand-père, il est peut-être mort » se dit-il.

L’île d’où il est revenu sur le dos du serpent est à peine visible. Il s’en va, vers l’endroit où sa mère est supposée être, en compagnie de l’homme avec lequel elle est partie.

En effet, la femme a accompagné l’homme après que celui-ci eut éloigné le garçon. Ainsi, tous deux sont allés demeurer très loin dans un endroit où il y avait une rivière, seulement une rivière. « Où vais-je demeurer? Se demanda le garçon. Comment puis-je me rendre à l’endroit où se trouve ma mère? »

L’homme qui restait avec sa mère était sorcier. Il avait déposé sur le chemin que le garçon devait suivre de la gomme bouillante. Il y mit le feu et toute la gomme fut embrasée. Le jeune garçon devait suivre cette route. « Que vais-je faire pour aller à pied sur cette route? » dit le garçon.

Alors il pense : « Je vais mettre mon pantalon de cuir. »

Après l’avoir mis (ou il l’a pris pour le mettre, je ne sais pas), il sauta dans le feu et d’un deuxième bond, il se retrouve de l’autre côté de la route. Bien que son pantalon de cuir soit tout rétréci, et partiellement brûlé, il peut encore marcher.

Reprenant son chemin, le garçon voit un hameçon. À l’endroit où l’hameçon est accroché, il y a encore du feu. L’énorme hameçon balance comme si quelqu’un s’en servait pour pêcher.

Comment pourrait-il marcher dans ce chemin et éviter le piège que lui a tendu de nouveau le sorcier?

Une fois de plus, le garçon s’arrange pour surmonter la difficulté. Il frappe le bois du feu et en frappant ainsi le bois, tout tombe. Il n’y a plus d’obstacles et le jeune garçon peut donc suivre son chemin librement.

Continuant sa route, il voit une large rivière, mais au moins, il y a quelque chose sur quoi il peut embarquer et qui lui permettra de traverser la rivière.

Après avoir réussi cette traversée, il arrive enfin à l’endroit où se trouve la cabane de sa mère. L’homme, étant sorcier, habitait sa propre cabane, mais toujours dans le même campement.

Alors, le garçon se dit : « Je ne montrerai pas tout de suite, je vais prendre la forme d’un oiseau pour quelque temps. Oui, j’apparaîtrai sous la forme d’un merle. Et si je veux changer m mère dit-il, je la changerai en pic doré. »

D’un seul coup le merle va en sautillant jusqu’à la porte de la cabane. En réalité, c’était le garçon qui paraissait ainsi.

Le merle sautillait partout à travers les copeaux de bois. Tout à coup, pense-t-il, je vais crier à l’intérieur au cas où ma mère serait là.

Alors il crie : « Maman je suis venu. »

La femme entend le cri, elle reconnaît la voix de son fils. Alors le merle reprend : « Maman, je suis venu. »

La femme se lève et voit le merle qui sautille, ici et là en faisant des petits bonds. « Ce n’est sûrement pas lui » se dit-elle.

Après un moment, elle retourne s’asseoir à l’intérieur de la cabane. « Quelle raison pourrait-il y avoir pour que j’entende cette voix? Pense la femme. Quelle en est la raison? C’est peut-être un signe que mon fils reviendra » pense-t-elle.

La femme entre dans la cabane et s’assoit.

Le merle crie de nouveau : « Maman, je suis venu. »

Elle sort de la cabane et voit son fils qui se tient debout. Poussant un cri de surprise, la femme lui dit : « Mais comment as-tu pu faire pour venir, mon fils? Le chemin a dû être très difficile pour revenir » dit-elle, car elle sait ce qu’on a fait subir à son fils. « Comment as-tu pu faire pour revenir? » répète-t-elle.

L’homme qui chassait aux alentours arrive au camp. Et alors, il dit au garçon : « Comment as-tu fait pour arriver jusqu’ici? Tu n’as pas à savoir ce que j’ai fait exactement pour venir ici, et tu ne le sauras jamais » répond le garçon à l’homme.

Le garçon sait bien que c’est l’homme qui l’avait amené dans l’île pour qu’il meure de faim. Aujourd’hui, il est revenu chercher sa mère.

(Je ne sais pas exactement ce que l’homme lui a encore fait)

Alors, il lui dit : « Tu ne sauras jamais ce que j’ai fait pour revenir, et je ne te le dirai pas » dit le garçon.

Voilà que le fils et sa mère sont de nouveaux réunis grâce à l’acharnement de Memeu.