M. et Mme Henri Germain, (recueilli en 1988 par M. Jean-Marie Basile)

Ses parents sont originaires de Mashteuiatsh et ses grands-parents sont peut-être originaires de Pessamit mais il n'est pas sûr. Il est fière d'être un Ilnu et aussi de la manière dont on lui a donné des enseignements concernant la trappe. Ils partaient en forêt vers la fin de l'été soit en août et ne revenait qu'en juin. Ils se nourrissaient d'orignaux et de lièvres parce qu'il n'y avait pas beaucoup de castors. Ils se nourrissaient que de viande de bois. Avant de partir pour la forêt, ils allaient acheter 12 poches de farine, 200lbs de sucre, la graisse, du lard salé. Ils montaient beaucoup de sel et de poudre à pâte..

Quand ils descendaient et s'il restait encore quelques provisions, ils les laissaient dans le bois. L'endroit où ils faisaient la trappe s'appelait : Massishk (Lac au Cèdre). C'était dans la rivière Mistassini. Ils montaient tout le long en canot avec toutes leurs provisions. Quand ils débarquaient, premièrement ils se cherchaient de la viande pour le fumer et le conserver pour l'hiver. Le trajet à la rame se faisait pendant un peu plus d'un mois. Ils partaient plusieurs familles en même temps, soit leur famille, la famille à Noé Germain, Barthélemie Germain, son frère Michel Germain et la femme de celui-ci. Ils ramaient tous ensemble jusqu'à ce qu'ils se séparent pour aller chacun dans leur territoire respectif. Ils se souvient quand il était encore très jeune environ (4 ans) qu'il n'y avait pas beaucoup de castors. C'était dû à une sécheresse qu'il y avait eu et les niveaux d'eaux étaient très bas. Il y avait que du vison et de la martre. Il a commencé à accompagner son père vers l'âge de 15 ans. Ils partaient très loin pour aller tendre leurs pièges et ne revenaient que très tard le soir. Parfois, c'était en canot et il fallait monter les rapides et d'autres fois ont partaient en raquettes. Ils se servaient des fusils pour chasser. Ils les achetaient à l'Hudson Baie soit pour 20.00$. Les fusils de calibre 22 étaient de 6.00$.

On achetait aussi une centaine de pièges de différentes grosseurs. Son père confectionnait des toboggans. Il en avait fait au moins cinq (5) quand ils étaient tous ensemble avec ses frères et ses sours. Ils passaient tout l'hiver sous la tente et changeaient souvent d'endroit soit au quinze jours (15). Il raconte qu'autrefois les Ilnutsh étaient des nomades. Ils ne restaient jamais longtemps au même endroit. Pendant leur trajet, ils rencontraient parfois des familles Cris. Leur tente ressemblait à un wigwam et ils étaient trois (3) familles dans cette même tente. Il raconte que premièrement ils faisaient la chasse pour leur survie et non pour faire beaucoup d'argent. Sa mère s'occupait a écorcher les animaux tués et à les mouler. Elle préparait les repas pendant que son père lui faisait la chasse. Elle faisait aussi le bois de chauffage. Il y avait aussi ses grandes sours qui chassaient dans les alentours. Lorsqu'ils descendaient ici, ils allaient vendre leurs fourrures a l'Hudson Baie et payaient aussi leurs dettes. Le gérant était Mr. Folley dans ce temps là. Il n'y avait aucun indien qui travaillaient dans ce magasin il y avait juste des blancs. On ne vendait pas de collets a lièvres dans ce temps-là, alors ont se servaient de corde, la corde dont on se sert pour faire des filets pour prendre le poisson. Il y avait une façon de le faire. Il dit qu'il serait encore capable de le faire aujourd'hui.

Pour que le lièvre ne mange pas cette corde, on le met d'abord dans le foie de lynx et le lièvre ne le mange pas. C'est son père qui lui a appris cet enseignement. Il raconte que son grand-père Etienne Germain s'est noyé pendant la trappe en automne à (Ka Upashkueiatsh) au lac Serpent. Ici à Mashteuiatsh, ses grand-parents étaient tenté à (tatipeuiautsh = longue pointe) Il parle de la tente à suer. Il raconte que son père (François Germain) faisait des tentes à suer (matitishan). Il dit qu'on prend des aulnes pour la monter et on prend aussi de la toile pour la guérison d'une personne et on doit le fermer comme il faut. Il raconte qu'il a déjà vu des personnes venant d'ici rentré dans cette loge. Son épouse raconte que lorsque la personne malade a très chaud et qu'il est en sueur, c'est sa maladie qui sort de lui. Alors on doit la couvrir comme il le faut lorsqu'elle sort de cette loge pour ne pas qu'elle attrape froid. Il raconte qu'il a toujours été catholique et qu'il a été baptisé et ses parents aussi et qu'ils ont toujours été pratiquant. Il raconte que ça fait déjà très longtemps que les prêtres sont venus ici. Ils sont venu jusqu'ici a rame et ils ont aussi parcouru les territoires à la recherche des Ilnutsh. On n'était pas encore né nous autres dans ce temps là. Son épouse raconte que les prêtres allaient partout en forêt pour aller confesser les Ilnutsh et dire la messe. Elle dit que c'était aussi pour venir les baptiser et c'est à ce moment qu'ils ont commencé a prier. La première personne ici à avoir une voiture a été Léon Jourdain et mon frère Michel s'en est acheté un aussi et Patrick Etienne a suivi et Joseph Connolly. Il y avait aussi Joseph Dominique qui avait une auto et Maleck Manigouche aussi. Ceux qui avaient une auto faisaient des voyages a ceux qui voulaient aller à Roberval pour aller magasiner. Ils demandaient 1.00$ pour aller a Roberval. Il y avait aussi le train et c'était 0.25 pour aller.

Autrefois quand les familles descendaient de la forêt, il y avait un gros makushan pour tout le monde. Aujourd'hui ça ne se fait plus. Juste de temps en temps dans les fêtes amérindiennes c'est un genre de makushan qu'ils font. Autrefois quand un Ilnu descendait de la forêt et lorsqu'il arrivait non loin de la communauté il tirait des coups de fusils. Alors tout le monde en entendant ces coups de fusils se disait il y a quelqu'un qui arrive. Autrefois on venait chercher des indiens pour aller dans l'armée. On n'allait pas chercher ceux qui étaient sur le territoire juste ceux qui étaient dans la communauté. Pour conserver la viande, on le faisait bien sécher et ensuite on le broyait comme il faut pour le manger pendant l'été. Et lorsqu'on tuait un orignal, on trempait la viande dans le sel. Il ne peut pas pourrir de cette façon. C'est ce cette façon qu'on conservait notre viande. L'ours on le fait fumer et c'est la même chose pour le castor. C'est toujours ma mère qui s'occupait de faire cuire la viande soit dans la tente ou à l'extérieur. Elle le faisait cuire avec du lard salé avec très peu d'eau on appelle ça (pakuessikueshim) ou elle le faisait cuire piquait sur un bâton près du poêle (on appelle ça tshituham) c'est de cette façon que mangeait nos ancêtres. Avec le castor tu peux le faire cuire de la même façon aussi.

Chaque fois quand on rencontrait des gens sur le territoire, on faisait un makushan. J'ai déjà un peu consommé de la graisse d'ours mais pas beaucoup. Parce que ça peut nous donner la diarrhée. Les Cris en consomment beaucoup de la graisse d'ours. Sur le territoire quand un personne est très malade, on lui donne toutes sortes de plantes ou de bois médicinal. Comme le maskobina, le merisier, l'épinette. Pour les accouchements, lorsqu'une femme était pour accoucher et s'il y avait d'autres femmes autour ils s'entraident entres femmes. Ce sont des aînées qui vont et le mari aussi assiste. Son épouse raconte que si il n'y a pas de femmes aînées autour et qu'ils sont juste deux alors c'est l'homme qui doit accoucher sa femme. Il raconte que son père a toujours accouché sa femme et il n'y avait jamais de femme autour de lui. Il dit qu'ils sont tous nés en forêt. Il n'y a jamais eu de bébé mort à leur naissance en forêt. Il raconte que le plus vieux des aînés ici dans la communauté s'appelait Etienne Basile. Il raconte que chez lui il parlait que montagnais. Son père a appris à parler un peu le français quand il allait travailler. Les premiers à apporter le français ici sont les Gill, les Robertson et les Buckell. Moi j'ai appris à parler français en allant travailler avec les ingénieurs et allant guider. Pour nous amuser on allait jouer au football le soir. On faisait un grand makushan sur le bord du lac. On installait une grande table avec les gens qui arrivait du territoire. Ils amenaient leur viande.

Tout le monde faisait la cuisine. Il y avait aussi des enfants. On servait les enfants avant. Quand on avait terminé le repas, alors on commençait a danser. Ils chantaient aussi en Ilnu et jouait du tambour (teuehikan) Il y avait un vieux qu'on apellait tshishelniu Damien (qui veut dire le vieux Damien). Il s'appelait Damien Siméon. Il était très âgé. Les gens dansaient pendant qu'il chantait. Il n'y avait pas de haine et tout le monde était content de se retrouver. Cela se répétait à chaque année et c'était une fête de se retrouver. Il raconte que son père lui a déjà raconté qu'il avait déjà vu des gens fumer le calumet. Ils fumaient en dansant. C'était juste des Ilnutsh qui le fumaient et il n'y avait pas de blancs. C'était des Ilnutsh qui venaient de notre communauté. Il y avait un aîné qu'on appelait Pishaish et qui avait un calumet. Il dit que ça nous appartient ça. Lui (Pishaish) son grand-père venait du nord. C'était un inuit. Il serait venu ici avec son épouse. Mais lui Pishaish il s'est marié avec une fille d'ici. Il était le père à Mr. Gabriel Kurtness et de Edouard Kurtness. Il s'est marié deux fois. Il a eu Gabriel avec sa première épouse. Quand un enfant naissait et qu'il n'était pas baptisé ça ne leur faisait pas peur. Quand une personne arrivait a leur tentement il leur demandait s'il pouvait baptiser leur bébé. On se servait quand même de l'eau bénite et aussi du sel pour le baptême traditionnel. Il raconte que son père a déjà fait ce genre de baptême a l'enfant de Mr. Charles Cleary. Il raconte que certains Cris était de très grands shamans.

Quand un shaman se fâchait contre une personne, il pouvait envoyer un sort juste en se servant de sa pensée. Mon père a déjà reçu un sort. Il avait fait fâcher un shaman. Pendant toute une année il n'a rien tué du tout pendant la trappe. Beaucoup de Ilnutsh peuvent être des shamans même un Pekuakamiulnu peut l'être. Il raconte que les têtes d'animaux qu'on accroche dans un arbre, comme les têtes de lièvres ou de castors raconte l'histoire des personnes qui étaient tenté à cet endroit. Ils racontent la chasse que ces personnes ont faite. Ils sont contents de dire que ces personnes ont fait une bonne chasse et qu'ils ont très bien mangé. Ces têtes accrochées raconte leur histoire pour que les prochaines personnes qui passeront par là sachent que ça très bien été. Les Ilnutsh ont toujours fait ça. Avant que les prêtres arrivent, il dit qu'ils priaient quand même à leur façon. Il raconte que les prêtres allaient jusque sur le territoire pour aller chercher les Ilnutsh. Le père Décarie a passé deux ans à Onistagan. Il y avait pas mal d' Ilnutsh là-bas quand ils ont voulu faire la réserve à cet endroit. C'est lui le père Décarie qui voulait faire cette réserve. Il y en avait qui était d'accord mais d'autres non. Moi je voulais pas et mon père non plus ne voulait pas. C'était trop loin. On allait déjà à cet endroit pour faire la trappe. Il raconte qu'il a déjà vu la tente tremblante (kushapissikan). Il dit qu'il y a une seule personne qui rentre mais qu'on ne voit pas cette personne, on doit la cacher. Il y a un certain M. Lévesque qui est venu le rencontrer et qui lui a parlé des compensations sur les territoires inondés. Il raconte qu'il lui a dit, que les autochtones ne pensent pas comme la plupart des blancs peuvent penser. Il lui a dit que l'Indien ne pense pas juste à demain mais qu'il pense beaucoup plus loin en avant. Il lui a dit que les aînés eux pensaient. Il lui a dit qu'ils ne pensaient pas à eux parce qu'ils allaient mourir bientôt mais qu'ils pensaient aux jeunes pour leur avenir. Il lui a dit que pour eux l'argent n'a pas d'importance. Ils pensent plutôt au territoire qu'ils vont laisser à ces jeunes là et que ceux-ci à leur tour le céderont à leurs enfants. Il lui a dit aussi que eux ce n'est pas l'argent qu'ils veulent mais bien leur mode de vie qu'ils pratiquaient jadis dans leur territoire. Pas de barrage et reprendre notre territoire comme il était auparavant. Il raconte qu'avant que le gouvernement sépare le territoire à chaque famille, il n'y avait jamais de malentendu. Il dit qu'il n'a jamais entendu un indien dire « ici c'est mon territoire allez vous-en » comme la façon que ça se passe aujourd'hui. Il y avait beaucoup d'entraide entre famille et on s'entendait bien. Aujourd'hui c'est plus pareil.