Kakuna la petite fille triste

Kakuna était une jolie petite fille de cinq ans.  Sa mère l'avait ainsi nommée pour lui rappeler qu’elle devait toujours attacher ses mocassins.  Souvent, Kakuna tombait car elle ne savait pas faire le nœud et la boucle qui gardaient en place ses mocassins.

Kakuna vivait avec son grand-père, son père, sa mère, ses frères et ses sœurs dans un tentement d’écorce de bouleau, en pleine forêt.  La famille vivait de la chasse et de la pêche.  Un jour d’hiver, ses parents partent pour tendre des pièges et des collets avec les plus vieux, laissant Kakuna avec son grand-père au tentement.  Après trois ou quatre jours, Kakuna commence à s’ennuyer et elle demande à son grand-père pourquoi sa famille est si longtemps partie au loin.

Plus les jours passent, plus la petite fille est triste.  Elle s’ennuie et pleure presque tout le temps.  Sa tristesse est si grande qu’elle ne mange plus rien, et aucun jeu proposé par le grand-père ne l’intéresse.

Voyant la détresse de sa petite-fille, le grand-père décide de l’amener faire une promenade dans la forêt.  Tous les soirs, vers sept heures, tous les deux marchent main dans la main sur la neige.  Le grand-père lui parle du silence de la forêt :  « Regarde les étoiles, les aurores boréales, vois comme c’est beau! »

Mais Kakuna ne semble pas l’entendre.  Elle répète constamment la même question sur le retour de sa famille au tentement.  De jour en jour, elle dépérit.  Le grand-père ne sait plus quoi faire pour chasser cette tristesse qui habite Kakuna.

Par une soirée illuminée d’aurores boréales, il a soudainement l’idée d’amener Kakuna au bord du lac pour mieux voir les reflets colorés et dansants des aurores boréales.  Viens avec moi au bord du lac, tu verras, ce n’est pas difficile.

Le grand-père tient la main de Kakuna qui marche très lentement et sans enthousiasme.  Elle est très triste, terriblement affaiblie.  Sur le bord du lac, le grand-père explique à Kakuna qu’en frottant les ongles de ses doigts les uns contre les autres elle réussirait à faire danser et changer les aurores boréales, et même à changer leurs couleurs.

Tout doucement Kakuna commence à frotter ses ongles et, peu à peu, les aurores boréales se mettent à bouger.  Le grand-père lui précise qu’il faut frotter plus vite et que les aurores suivront le rythme de ses mains.  Kakuna frotte ses ongles de plus en plus vite; les aurores boréales dansent vivement, chantent plus fort et les couleurs se multiplient.  C’est un spectacle éblouissant et Kakuna est émerveillée.  L’effet est magique.  La petite fille se met à rire, à chanter et à danser.

Le lendemain, elle demande à son grand-père de retourner près du lac pour faire danser à nouveau les aurores boréales.  Durant ces moments magiques, elle oubliait l’absence de sa famille.

Sous le regard affectueux du grand-père, Kakuna reprenait goût à la vie.  Soir après soir, la petite fille s’amuse à ce nouveau jeu.  Mais, pour le grand-père, le temps était venu de lui apprendre que ses parents ne reviendraient plus jamais; qu’ils s’étaient noyés en descendant la rivière qui alimentait le lac.

Kakuna devint triste et pleura doucement.  Mais, bien vite, elle se consola en pensant à la joie que lui procurait son nouveau jeu.  Elle se mit à s’imaginer que ses parents pouvaient la voir s’amuser ainsi avec les aurores boréales.  Durant ces moments magiques, elle retrouvait ses parents qui, de là-haut, dans cette vie sans fin, pouvaient l’observer et être fiers d’elle.

Par ce jeu, le grand-père dans sa sagesse avait enseigné à Kakuna qu’elle n’était pas seule, que l’espoir et la confiance pouvaient transformer une peine en joie.